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Job-hugging, job-hopping : quelles pratiques dominent le marché du travail mondial ?

jeune femme allant au travail
monkeybusiness / Envato Elements
Écrit parAsaël Häzaqle 06 Octobre 2025

Quand viendront (enfin) les beaux jours ? Le marché du travail international subit le contrecoup de l'incertitude actuelle. Les conflits géopolitiques plongent le monde dans un inconnu inquiétant. L'instabilité politique gagne des pays que l'on pensait jusqu'alors épargnés. « Rien n'est sûr. ». Et parce que rien n'est sûr, mieux vaut revoir ses projets d'expatriation. Les candidats au départ font leurs calculs. Oser démissionner ou rester à un poste que l'on n'aime pas ? Se reconvertir ou rester dans la même filière ? Analyse des dernières tendances du marché du travail international.

Job hugging, ou comment s'accrocher à son emploi coûte que coûte

A priori, l'image semble positive. On imagine une personne aimant son travail au point de littéralement la « serrer contre elle ». En réalité, il faut plutôt imaginer un salarié vissé à son emploi par crainte du lendemain. Le job hugging n'est pas une question de choix volontaire. Il traduit plutôt une réaction de défense face à un marché économique incertain. Si le phénomène a été observé aux États-Unis, il touche d'autres pays. Les phénomènes de démissions massives vus pendant la Covid sont passés. Aujourd'hui, on s'accroche à son travail par peur de le perdre. Car l'incertitude économique touche directement le marché du travail international. La percée fulgurante des intelligences artificielles ajoute à l'incertitude : autonomisation des tâches, suppression de postes, réduction des missions au profit de l'IA… Les travailleurs préfèrent garder leur emploi, même s'ils ne l'aiment pas, plutôt que de plonger dans un inconnu qui inquiète. Les jeunes seraient davantage touchés par le phénomène.

On pourrait croire que le job hugging est un moindre mal. Au moins, les ²õ²¹±ô²¹°ù¾±Ã©²õ restent dans l'entreprise. Moins de turn-overs, plus de fidélisation. C'est oublier que le job hugging n'a justement rien à voir avec la fidélisation. Les ²õ²¹±ô²¹°ù¾±Ã©²õ ne restent pas par loyauté avec l'entreprise, mais parce qu'ils ne savent pas où aller. Leur présence ne signifie pas qu'ils s'impliqueront dans la vie de l'entreprise, au contraire : désengagés, ils ont tendance à faire le strict minimum pour conserver leur emploi. Certains veulent voir les choses positivement. Ils ne demandent pas de promotion, ne veulent pas changer de poste et préfèrent rester dans ce « statu quo » qui leur permet de vivre. Pas d'émulation interne, de formation, d'ascension sociale, de prise de risque mesurée. Au niveau macroéconomique, un job hugging pourrait conduire à une paralysie du marché du travail international. Au niveau individuel, ses conséquences sont tout aussi graves : perte de confiance en soi, démotivation, anxiété, et même, dépression.

« Positive » Job hugging : investir pour l'avenir

Et si le job hugging avait véritablement une phase « positive » ? Car ici, le « job hugger » utilise son poste comme une couveuse ou une salle d'attente. Il est prêt à patienter dans son emploi actuel le temps d'économiser assez pour s'expatrier, par exemple. Ou alors, il suit une formation et compte changer de poste dès qu'il sera diplômé. Il n'a aucune attache avec son emploi actuel, mais se dit physiquement et psychologiquement prêt à « faire le job », pour concrétiser son projet professionnel. Ce type de job hugging n'enferme donc pas dans une stagnation sans fin, mais prépare à la future carrière. Ce temps d'attente n'est pas un temps mort. Le travailleur réserve ses forces pour son projet. D'où l'idée « d'investissement pour l'avenir ».

Ce type de job hugger paraît davantage fidèle à l'entreprise, car son attitude est positive. Il ne reste pas en poste par angoisse, mais capitalise pour sa carrière. Selon les partisans de cette analyse, il y aurait donc deux types de job hugger : le job hugger « passif », qui stagne dans son emploi, mais refuse d'en changer par crainte que sa situation se dégrade, et le job hugger « investisseur », qui continue d'être actif dans son poste actuel, pour mieux évoluer professionnellement. Les tenants de cette analyse rappellent toutefois que cet aspect « positif » ne peut s'entendre que chez un travailleur n'ayant pas son travail complètement en horreur. Le job hugger investisseur n'est pas déprimé ou en détresse psychologique. Cette donnée est essentielle, car le job hugging « positif » peut être dangereux pour le travailleur. Donner l'illusion que tout va bien alors qu'on ne supporte plus son travail crée une situation de stress. Les conséquences sur la santé mentale peuvent être sérieuses.

Job cuffing, la fidélité à court terme

À première vue, job hugging et job cuffing semblent similaires. Les termes sont effectivement proches, car dans les deux cas, le salarié n'aime plus vraiment son travail. Mais on observe une différence importante. Le job hugger reste à son poste, car il craint pour l'avenir. Son attitude est défensive. A contrario, le job cuffer reste à son poste par sécurité et confort, en attendant un jour meilleur. Il se rapproche davantage du « positive job hugger ». Dès qu'il aura une opportunité professionnelle (expatriation, changement d'entreprise, promotion…), il quittera son poste actuel sans regret.

Job hopping, booster de carrière ou piège pour l'expatrié ?

On craint encore le CV à trous, synonyme d'instabilité pour un grand nombre de recruteurs. Mais on craint tout autant le CV trop riche en courtes expériences professionnelles. N'est-il pas lui aussi un signe d'instabilité ? Non, affirment les partisans du job hopping. Tout comme il est possible d'expliquer un CV à trou (et de tourner le « vide » à son avantage), il est possible d'expliquer les changements fréquents d'emploi. Le job hopping est l'exact opposé du job hugging. Les job hoppers n'hésitent pas à quitter un emploi qu'ils n'aiment pas, même si la conjoncture est morose. Ils n'attendent d'ailleurs pas d'être lassés de leur emploi pour en changer, et n'hésitent pas à changer d'entreprise pour « voir ailleurs ». Accumuler des expériences : voilà ce qui les motive. Ce comportement se retrouve davantage chez les jeunes diplômés et les jeunes actifs. Ils partent à l'étranger, accumulent diverses expériences, se construisent une carrière, développent leur réseau…

Mais comment bien intégrer ces expatriés pour qui « carrière » peut s'entendre comme une succession d'expériences professionnelles ? Comment les fidéliser à l'entreprise ? Certains recruteurs estiment encore que le job hopper n'est pas fiable. Selon eux, il ne peut être mobilisé sur un long projet, car il ne reste pas assez longtemps dans l'entreprise. Son parcours peu cohérent n'est pas gage de sérieux. Ses nombreuses expériences ont développé sa capacité d'adaptation, mais il n'arrive pas pour autant à bien intégrer la culture du pays d'accueil. Au contraire, les job hoppers estiment qu'ils peuvent parfaitement dégager un fil rouge de leurs diverses expériences. Car celui-ci fait apparaître des compétences techniques et sociales : c'est en développant le récit de leurs missions que les expats job hoppers parviennent à rassurer les recruteurs étrangers.

Tendances du marché du travail international : quel impact sur l'expatriation ?

Tous ces changements du marché du travail international mettent en lumière les difficultés socio-économiques actuelles. Depuis quelques années, les crises extrêmes se succèdent : crise sanitaire, phénomènes climatiques majeurs, guerres impliquant de grands blocs d'États. Le monde semble se polariser, pris dans des tensions sévères. C'est dans ce contexte que le ³Ùé±ôé³Ù°ù²¹±¹²¹¾±±ô a fait son essor, avant d'être remis en question. C'est également dans ce contexte que l'IA a fait une percée spectaculaire, que certains comparent aux révolutions industrielles. Or, l'IA fascine autant qu'elle inquiète.

De l'aveu des chercheurs, il faudra bientôt se former tout au long de la vie. C'est déjà le cas aujourd'hui, surtout chez les travailleurs évoluant dans des secteurs économiques très concurrentiels. Ce sera encore plus le cas demain, à cause (ou grâce, tout dépend du point de vue) de l'IA. Les changements pourraient même être plus radicaux, car il faudrait être prêt à changer complètement de secteur professionnel, et ce, plusieurs fois dans sa vie. Mais qui serait prêt à le faire ? Qui en aurait les moyens ?

Cette formation nécessaire pour résister à l'IA pourrait faire croire que le marché du travail international de demain sera 100 % « job hopping ». Que les travailleurs se rassurent. Il est peu probable que le job hopping devienne la norme. Il continuera de coexister avec les autres formes de vision du travail.

Sources :

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A propos de

Rédactrice web spécialisée en actualité politique et socio-économique, Asaël Häzaq observe et décrypte les tendances de la conjoncture internationale. Forte de son expérience d’expatriée au Japon, elle propose conseils et analyses sur la vie d’expatrié : choix du visa, études, recherche d’emploi, vie de travail, apprentissage de la langue, découverte du pays. Titulaire d’un Master II en Droit - Sciences politiques, elle a également expérimenté la vie de nomade numérique.

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